Le partage d’un repas avec les Inuits

Ce soir, toute l’équipe de L’Âme Bleue : Jacques, Cédric, Joël, Florent et moi, invitons Kathy, Dion et Tom à partager notre repas.

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Kathy, notre amie depuis cet été lors de la navigation avec « Vagabond » vers Home Bay est particulièrement connectée à sa culture, la nature et le monde sauvage. Depuis peu, elle suit une formation pour travailler les peaux.

Dion est le fils de Philippe, l’un des 5 grands plongeurs du village. Comme un poisson dans l’eau, il ne cesse de nous surprendre par sa volonté et son aisance sous la glace. Tom est éveillé, malin, il comprend très vite les choses, il fait preuve d’une grande maturité pour son âge.

Des villageois nous ont apporté de « l’arctic char », c’est de l’ombre chevalier, un délicieux poisson d’eau douce à la chair grasse, de couleur saumon. Les Inuits les pêchent dans les lacs.

Mélangeant produit local et culture Française, nous le cuisinons dans le vieux piano en fonte de Markosie, accompagné de riz et de légumes et d’un beurre blanc sans vin, car la consommation d’alcool dans le Nunavut est très réglementée.

C’est une belle occasion de s’imprégner un peu plus de la culture. Kathy se prête au jeu avec plaisir. Elle nous explique comment dire oui, puis non, en passant par des expressions du visage. Nos imitations les font bien rire.

Ensuite, avec Tom, ils nous apprennent l’alphabet Inuktitut . Puis des mots et des petites phrases comme « heart », « i love you » et bien d’autres encore.

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Ils nous montrent aussi le bisou Inuit. C’est un bisou qui se fait en collant ses narines sur la joue tout en soufflant avec son nez. Il peut s’enchaîner 3 ou 4 fois rapidement, rythmé par le souffle passant par les narines.

Kathy aime le beurre blanc, il arrondit les arômes et accompagne d’une belle manière ce poisson. Nous adorons découvrir la calligraphie de leur écriture, leur doux et mélodieux langage et leur histoire. Nous nous comprenons de mieux en mieux malgré la barrière de la langue (nous échangeons en Anglais).

Papa offre le livre photo de cet été à Kathy. Elle est ravie. La veille, nous avons remis à Kathy et à toute sa famille la photo de famille prise à « Home Bay » l’été dernier.

Dion tout sourire observe et participe à cette soirée à sa manière, en toute discrétion.

Des regards, des rires, des sourires.

Nous plongeons dans cette part d’inconnu, qui le temps d’un soir nous unit mettant en doute toutes nos certitudes.

Nous perçons la glace et nous nous réchauffons par un bon repas et de la chaleur humaine. Nous en avons besoin pour survivre ici.

L’Homme dans cet espace prend une part prédominante. Il nous guide vers le respect de la nature et de l’autre. Des gestes, des attitudes, une psychologie, une culture très différente. Le cheminement pour comprendre l’autre nous rassemble, nous unit malgré nos différences.

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L’Âme Bleue de retour de son expédition hivernale au Nunavut

Après deux semaines dans le Grand Nord canadien, Laurent Marie et quatre membres de son association L’Ame Bleue sont de retour en France.

 Avec des températures extérieures entre -25 et -40°C et une eau à -2°C, l’aventure et les plongées en apnée se sont déroulées dans des conditions très extrêmes. Après avoir vu l’été en 2015, l’équipe de l’Ame Bleue a pu observer la saison hivernale et vivre au contact des Inuits.

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Pêche d’algues et de clams avec les villageois, plongée le long des icebergs, initiation à la plongée pour les enfants Inuits sans oublier d’achever le tournage du prochain film sur la pensée sauvage, l’expédition a été riche et ils reviennent avec une meilleure connaissance de l’Arctique et de son peuple Inuit.

 

Des plongées sidérales

Ils ont plongé tous les jours pendant dix jours entre 50 minutes et 1 heure maximum dans l’eau à -2°C. En apnée, Laurent Marie reste environ 2 minutes sous l’eau, ensuite il doit remonter et respirer de l’air à -35°C, c’est très engageant physiquement. « Au dessus, il y a la glace, la banquise et notre puits lumineux, les nuances de bleu sont extraordinaires. J’ai été envouté par la magie de l’hiver, les eaux limpides, cristallines avec une visibilité de plus de 40 mètres sous la banquise. C’était sidéral de plonger le long de l’iceberg emprisonné dans la banquise à -30 mètres. L’engagement et la difficulté sont là ! Il faut descendre, remonter et retrouver le trou à plus de 10 mètres de l’iceberg. On a l’impression de basculer dans un autre monde…»

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Un monde de glace

Laurent n’a pas hésité à plonger le long de l’iceberg. En surface, il monte à 12 mètres de haut et 30 mètres sous la banquise. A l’échelle de cet iceberg, la banquise n’est qu’une croute. « La glace vit, sous l’eau on entend des craquements forts. Un autre iceberg sur lequel nous aurions pu plonger s’est écroulé. Il faut toujours se rappeler que cet univers peut-être dangereux. »

En effet, l’environnement est très extrême, le froid assommant. Il faut apprendre à lutter contre par mesure de sécurité, et par survie. Ils n’avaient pas droit à la moindre erreur. « Le froid se glisse partout, jusque dans les os ».

Mais cette expédition a été au-delà des plongées en apnée… Laurent Marie et ses 4 équipiers ont vécu au contact des Inuits. Ils ont créé des liens avec les villageois. L’initiation à l’apnée a été un grand évènement à Qikigtuarjaq ! Même s’ils ont peur de l’eau et ne savent pas nager, quelques Inuits ont fait confiance à Laurent et son équipe pour s’immerger et ils en gardent tous un souvenir fabuleux. Cette dimension pédagogique, l’Ame Bleue souhaite la faire perdurer pour les prochaines expéditions.

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Jeudi 3 mars : journée mondiale de la vie sauvage, l’exemple des Inuits

Après ces moments de vie avec les Inuits, Laurent peut témoigner : « il y a des harmonies invisibles qui existent. Lorsqu’un ours rôde autour du village, les Inuits vont tout de suite le sentir, sans même le voir. Lorsqu’il s’agit de chasser le narval, ils anticipent leurs déplacements. Depuis la nuit des temps, ils s’imprègnent de la force des animaux et ont en eux une sorte d’intuition sauvage, c’est incroyable. »

Premier récit : à la pêche aux algues

« Voici le récit de notre première excursion sur la glace….

Nous croisons des pêcheurs d’algues sur le chemin du bateau. Dans la banquise, épaisse d’environ 70 cm, ces pêcheurs font un trou. Nous nous situons face à une presqu’île, pas loin d’une petite baie où hiverne « Vagabond ».

Un groupe d’Inuits plongent une longue tige de bois. Au bout une croix, des clous, espérant lors de la rotation de la tige, remonter des « sea weed », une algue longue et fine, jaune et brunâtre que les Inuits raffolent. Ils cuisinent ces algues pour accompagner le ragout de phoque par exemple, cela donne du goût, il paraît que c’est merveilleux.

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Nous goutons cette algue tout juste sortie de l’eau gelée. C’est croquant, iodé, cela rafraichi mais c’est quand même très fort. Leur technique est rudimentaire mais elle permet certainement de préserver la ressource pour toute la communauté.

Avec toute l’équipe de l’Âme Bleue et avec l’accord des pêcheurs c’est décidé, nous plongerons demain à la découverte de ces algues. Peut-être nous en cueillerons…

Le lendemain, nous nous levons de bonne heure, nous approchons du site. Nous avons un « Skiddo » (motoneige) et une luge pour acheminer tout notre matériel de plongée. Le spot est à environ 2 km du village, le déplacement est court. Rapidement, nous montons la tente, nous creusons des trous dans la glace. Pour des raisons de sécurité nous faisons deux trous, sous la banquise nous observons un léger courant. John y creuse le premier avec Cédric, Éric et sa femme France le deuxième. Le froid intense, l’onglet fait presque perdre connaissance à France. Mais elle se connaît bien, elle respire, prend son temps et reprend vite ses esprits pour continuer cette journée. Le froid ne pardonne rien, nous prenons cela pour une mise en garde. Soyons prudents et écoutons.

AL6A9150-2Jacques, notre caméraman est prêt. Il s’immerge le premier. Cédric et moi nous le rejoignons vite. Nous sortons de la tente pour vite plonger dans la mer qui fume. En effet, elle est plus chaude que l’air à -30°C ce jour-là. La combinaison humide au contact de l’air gèle presque instantanément. Le froid sans vous prévenir, pénètre votre corps et vous plonge dans une sévère hypothermie. Cela peut-être très dangereux. Chaque seconde compte, il ne faut pas trainer.

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Sous l’eau, c’est un grand spectacle du sable, des roches parsemées sur lequel poussent des « sea weed » les fameuses algues fines et longues, jaune et brunâtres. Sur notre tête un toit bleu-vert au reflet presque violet, nous éclaire. L’eau est limpide, nous voyons l’horizon à perte de vue. Le contraste coloré nous surprend, nous ne nous attendions pas à autant de vie au cœur de l’hiver.

Les Inuits les localisent avec une petite caméra poisson reliée à un écran sur la surface : les techniques modernes se mêlent à la pêche ancestrale.

Ils nous apprennent par cette façon à les reconnaitre car il en existe plusieurs sortes. Avec Cédric, nous en remontons quelques-unes. Ils courent vers le trou et s’exclament de joie comme des enfants. Ils sont heureux et nous sommes ravis de leur faire plaisir.

Notre premier bonheur partagé !

Ils les stockent et nous replongeons traversant la distance qui sépare les deux trous à la recherche de ces fameuses algues.

Jacques relié par un cordon qu’Éric tient fermement depuis la surface, immortalise la scène.

À la fin de sa plongée, il finit par une bonne cueillette. Les pêcheurs sont très heureux et décident de lancer un appel radio pour partager toute cette pêche avec les villageois.

Une solidarité, une entraide perdure chez les Inuits.

Nous sommes fiers de contribuer à cette collaboration, cet échange culturel, cette découverte, ce partage autour des algues avec le respect de chacun. »

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L’équipe de l’Ame Bleue en attente de meilleures conditions

Partis mardi dernier de Paris pour leur expédition dans le Grand Nord canadien, Laurent Marie et son équipe de l’Âme Bleue sont bloqués à Iqaluit pour cause de mauvaises conditions météo… Pour arriver au bout de leur périple, ils doivent prendre un dernier avion. Ils espèrent que la météo sera plus clémente aujourd’hui pour pouvoir s’envoler…

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Voici le récit de Laurent :

« Cela fait deux jours que nous tentons de nous rendre à Qikiqtuarjaq. Les mauvaises conditions météorologiques à Pangnirtung rendent l’atterrissage de l’avion impossible. Le brouillard, le vent, la température extérieure qui varient entre -28°c à -35°C, tous ces facteurs sont des obstacles pour atteindre notre camp de base.

Alors nous marchons dans la ville d’Iqaluit, capitale du Nunavut, nous échangeons avec la population. La baie a complètement gelé comme si les vagues étaient figées par le froid glacial et le vent souffle très fort.

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Par hasard, nous avons croisé des journalistes de la chaine CBC North Nunavut qui ont souhaité faire un reportage sur l’équipe et notre projet avec Éric Brossier. Le reportage est d’ailleurs passé ce soir à TV.

Avant de nous coucher, nous nous laissons surprendre par des aurores boréales qui courent et tourbillonnent dans le ciel. Leur vitesse de déplacement est impressionnante. La magie du grand nord guidée par « la pensée sauvage » s’ouvre à nous.

Patience avec un peu de chance l’avion comme les aurores, nous fera voyager aujourd’hui.

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A bientôt, Laurent. »

Une 1ère partie d’aventure se termine… Une 2ème se prépare !

Nous sommes partis, il y a 1 mois et il est déjà temps de rentrer.

Nous tournons ainsi la première page de cette aventure mais nous reviendrons quand la banquise protègera cette mer de tous ces secrets. Rendez-vous au mois de février pour un retour au village.

Nous avons déjà hâte de retrouver les enfants et Jaypootie pour de nouvelles aventures. Nous nous déplacerons en moto neige et ferons des trous dans la glace pour nous immerger.

En attendant, reprenons des forces car les nombreuses plongées, l’hypothermie, les longues heures d’attente à l’affût, la navigation, la glace ont laissés des séquelles.

Souhaitons à Eric un bon début d’hivernage. Merci à Kévin et Jérôme pour leurs images qui seront en partie bientôt dévoilées. Bravo à joël pour son coup d’oeil et ses photos et surtout merci à Patrick, indispensable pour cette aventure, présent à chaque seconde pour l’équipe et tous ceux qui nous suivent. Félicitations à Emilie et Anne-Cécile pour leur implication et leurs disponibilités.

 Et merci, merci à tous nos partenaires et tout ceux qui suivent et nous encouragent…!

Laurent

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L’initiation à l’apnée de RENO

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Après notre retour des fjords du nord, c’est avec grand plaisir que nous avons retrouvé « qik » et les enfants du village. Ceux-ci nous attendaient avec impatience afin de continuer à plonger. Avec une météo toujours clémente, nous avons réussi à initier encore bon nombre de petits Inuits. Ce fut l’occasion de scènes de rire et de partage avec eux.

J’ai eu l’occasion de pouvoir emmener dans l’eau « Reno », un jeune inuit un peu différent.

Personne ne l’attendait et je l’ai vu arriver en disant « I want to dive ». Tous ceux qui l’entouraient avaient l’air surpris mais lui était très impatient.

A peine lui avais-je donné sa combinaison que déjà il l’avait sur le dos, palmes aux pieds, prêt pour un grand plouf. Nous y allons. Il manque de trébucher à plusieurs reprises en marchant avec les palmes. Il écoute quelques uns de mes conseils et se jette littéralement à l’eau. Il bouge les bras, les jambes soulevant l’eau dans tous les sens. Il préfère rapidement rester flotter sur le dos en s’aidant de ses bras pour avancer. Je lis tellement de bonheur dans ses yeux, j’en suis ému aux larmes.

Alors il se tourne vers la berge en criant à tous les autres  » I do it , I do it ! » ; et malgré le froid qui fait tressaillir tout son corps, il tient à rester dans l’eau, heureux de montrer aux autres qu’il est capable de faire comme eux.

A chacun son Everest… Je suis très heureux d’avoir pu partager ces moments dans l’eau avec lui, de ce que je lui ai apporté et de ce qu’il m’a apporté.

Patrick

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L’Ame Bleue à Montpellier

Les écoliers de l’école Jules Verne à Montpellier ont eux aussi eu le droit à une présentation privilégiée de l’expédition « Un Monde de Glace » par Laurent Marie.

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C’est toujours avec plaisir que l’équipe intervient auprès du public scolaire pour lui faire partager ses aventures. L’apnée est un formidable vecteur pour faire rêver, sensibiliser et montrer la beauté du pôle sud, de notre sport…
Des échanges ont eu lieu avec les CE1 sur l’importance de la chaîne alimentaire pour l’équilibre des écosystèmes, la préservation de la biodiversité, le réchauffement climatique… C’est l’occasion de réfléchir ensemble à des actions simples à mener pour devenir un citoyen responsable dès le plus jeune âge.
Les présentations suscitent des questions qui sont parfois très surprenantes… »Mais tout cela c’est vrai ? « . Ces réactions spontanées et inattendues nous encouragent à continuer de faire rêver les enfants et leur montrer la beauté de la planète sur laquelle nous vivons.

 

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Nous remercions les élèves de maternelle pour leur belle création.